Simon Gokkes

Simon (Sim) David Gokkes (21 mars 1897 - 5 février 1943) était un compositeur, chef d'orchestre et innovateur musical juif néerlandais dont la carrière prometteuse a été tragiquement interrompue par l'Holocauste. L'expertise de Gokkes couvrait plusieurs domaines musicaux, notamment la composition, la direction de chorale et la musique synagogale. Son approche novatrice de la préservation et du renouvellement des mélodies juives traditionnelles, associée à ses techniques de composition modernes, a fait de lui une figure importante de la musique juive néerlandaise du début du XXe siècle. Cependant, l'occupation nazie des Pays-Bas et l'Holocauste qui s'ensuivit n'ont pas seulement coûté la vie à Gokkes, mais ont également entraîné la perte d'une grande partie de son héritage musical, ne laissant à la postérité que des fragments de son œuvre.

Né à Amsterdam, Gokkes fait preuve d'un talent musical dès son plus jeune âge. Il reçoit sa première formation vocale de Ben Geysel, chanteur d'opéra, et de Victor Schlesinger, cantor de la synagogue Rapenburg d'Amsterdam. À l'âge de quinze ans, Gokkes avait déjà composé ses premières œuvres, « Ngolinu Leshabiag » et « Yigdal », qui ont été interprétées par le chœur de la synagogue Rapenburg en 1912. Adolescent, il commence à diriger plusieurs chorales, préfigurant ainsi sa future carrière.

Gokkes poursuit son éducation musicale au Conservatoire d'Amsterdam, où il étudie la composition avec Sem Dresden, ainsi que le piano et la flûte. Après avoir obtenu son diplôme en 1919, il travaille brièvement comme assistant metteur en scène à l'Opéra des Pays-Bas avant que le service militaire n'interrompe sa carrière. Cette première expérience à l'opéra influencera plus tard son approche de la composition vocale.

En 1921, après son service militaire, Gokkes fonde l'Amsterdamsche Korenschool (école de chœur d'Amsterdam). Cette initiative visait à faire revivre le style « Liedertafel » des chœurs de voix masculines et, selon les journaux contemporains, a connu un succès artistique considérable. L'approche novatrice de Gokkes en matière de musique chorale s'est étendue à son rôle de longue date en tant que chef du Santo Serviço, le chœur de la synagogue portugaise d'Amsterdam.

Gokkes est surtout connu pour ses contributions à la musique synagogale, avec un accent particulier sur la préservation et le renouvellement des mélodies juives traditionnelles. Son « Sjire Kodesh », un recueil de mélodies pour les offices synagogaux, illustre ses efforts pour maintenir l'authenticité des traditions musicales juives tout en utilisant des techniques de composition modernistes, dont certaines montrent l'influence évidente des compositeurs français Debussy et Milhaud. Gokkes estimait que les influences profanes, en particulier celles de l'opéra, étaient devenues trop dominantes dans la musique de la synagogue, et il a cherché à restaurer ce qu'il percevait comme une pureté perdue.

L'une de ses œuvres les plus remarquables, composée en 1928, s'inspire des Lamentations de Jérémie. Cette pièce pour voix solistes, quintette à vent et piano témoigne de l'approche novatrice de Gokke, les chanteurs ne chantant que la syllabe « ha » - une technique remarquablement moderne pour l'époque. La même année, il a également écrit des chansons subtiles sur des textes néerlandais, hébreux et français, démontrant ainsi sa polyvalence en tant que compositeur.

L'œuvre de Gokke comprend également des œuvres profanes, comme sa Sonatine pour piano (1939), qui reprend des thèmes de l'histoire biblique d'Esther. Cette pièce, que l'on pense être sa dernière composition, démontre la capacité de Gokke à intégrer des thèmes juifs dans des formes classiques. Le compositeur Max Vredenburg, examinant les compositions de Gokkes en 1933, a reconnu sa préférence pour la musique vocale et a fait l'éloge de ses petites œuvres pour chœur d'hommes, bien qu'il ait critiqué l'œuvre plus importante de Gokkes, « Exodus ».

La montée en puissance de l'Allemagne nazie et l'occupation des Pays-Bas qui s'ensuivit eurent un effet dévastateur sur la vie et la carrière de Gokkes. En 1939, le violoniste polonais Bronislaw Huberman lui propose de diriger l'Orchestre symphonique de Palestine (aujourd'hui Orchestre philharmonique d'Israël). Cette invitation, qui s'inscrivait dans le cadre des efforts déployés par Huberman pour sauver les musiciens juifs de la persécution nazie, aurait pu sauver Gokkes et sa famille. Cependant, Gokkes a décliné l'offre, préférant rester aux Pays-Bas.

Tragiquement, cette décision s'est avérée fatale. Gokkes, sa femme Rebecca et leurs deux enfants David et Rachel ont été déportés au camp de concentration d'Auschwitz, où ils ont été assassinés le 5 février 1943. L'occupation nazie et l'Holocauste ont entraîné la perte d'une grande partie de la production musicale de Gokkes. Le pillage des biens juifs a entraîné la disparition d'un grand nombre de ses manuscrits et compositions.

Aujourd'hui, seule une fraction des œuvres de Gokkes survit, conservée à l'Institut néerlandais de musique. Ce qui reste est remarquable par sa grande qualité et son caractère étonnamment moderne, suggérant le potentiel d'une carrière qui a été tragiquement interrompue. L'histoire de Simon David Gokkes, bien que fragmentaire, montre l'ampleur de la perte d'un tel art musical et rappelle à quel point d'innombrables talents ont disparu au cours d'une des périodes les plus sombres de l'histoire.

Sources

Scholten D. Simon Gokkes. In : Alders C, Pameijer E, eds. Suppressed Composers in the Netherlands : Forbidden Music in the Second World War. Boydell & ; Brewer ; 2024:109-114.

Sholten, Dietrich et al.

Sholten, Diet Simon Gokkes. Site internet de Forbidden Music Regained, consulté en sept. 2024.

Evans, C.J. 2020. Rediscovering the Forgotten Music of the Holocaust: The Life and Music of the Dutch-Jewish Composer Sim Gokkes. Thesis, MA by Research. University of Birmingham.